De la surtension à la surcapacité


Tania Mysak

Alors que nous entamons la troisième année de la pandémie et que la variante Omicron menace (à nouveau) notre système de santé, personne ne veut plus entendre parler de « résilience » ou de « pivotement ». Nous sommes, à juste titre, épuisés de faire face à la perturbation de nos vies professionnelles et personnelles. Une fois épuisé, le repos constitue le traitement à court terme prescrit, et la stratégie à plus long terme devrait nous amener à réfléchir et à ré-évaluer là où notre énergie future sera la mieux appliquée.

Alors que j’écris ces quelques lignes au début de 2022, on parle beaucoup de la capacité de nos systèmes de soins de santé. La variante Omicron a rapidement submergé notre capacité à effectuer des tests et en matière de traçage. La capacité des hôpitaux est également menacée, en partie à cause des dizaines d’années passées à structurer nos systèmes afin de pouvoir offrir une vaste gamme de services de la manière la plus simple possible. En réponse à la croissance démographique et aux progrès de la pratique, la pratique de la pharmacie s’est elle aussi développée. Nous constatons que ces tendances se reflètent dans le Sondage sur les pharmacies hospitalières canadiennes : nous avons étendu nos activités cliniques aux cliniques ambulatoires et aux salles d’urgence, nous avons distribué des tâches cliniques supplémentaires aux techniciens en pharmacie, et les services de distribution fournissent plus de doses unitaires et intègrent davantage de technologies. Dans un souci d’efficacité, nous nous sommes attachés à proposer ces services de la façon la plus allégée (lean) possible.

À l’avenir, nous souhaiterons peut-être repenser la notion selon laquelle toute croissance est bénéfique et la gestion allégée toujours meilleure. Faisons-nous fausse route? Si nos systèmes ne sont ni flexibles ni redondants, nous sommes alors à la merci de petites embuches qui nous poussent à réduire des services que nous préconisons comme étant « essentiels » en période faste, mais « facultatifs » en période de vaches maigres (par exemple, réduire certains services cliniques pour soutenir la distribution si quelqu’un est malade). Pouvons-nous, de façon réaliste, tout faire pour tous les patients, tout en offrant toujours des services de qualité?

Imaginez un service où les redondances stratégiques favoriseraient l’innovation : du temps pour travailler sur un projet, des efforts en matière d’assurance de la qualité, de préceptorat ou de recherche. Est-ce que la satisfaction du personnel s’améliorerait? L’épuisement professionnel diminuerait-il?

De même, la Société canadienne des pharmaciens d’hôpitaux a eu des conversations sur la nature de ses activités fondamentales et sur sa manière de les prioriser pour renforcer les acquis, plutôt que de les développer. Les excellentes idées sur ce que nous pourrions faire et sur ce que nous pourrions même très bien faire abondent. Mais la vraie question consiste à savoir si nous devrions poursuivre ces activités, et si nous disposons des ressources pour les mener à bien en plus de nos activités fondamentales. Le lobbying auprès du gouvernement, les grandes campagnes de sensibilisation du public, les outils spécialisés de la pratique clinique sont, par exemple, des initiatives coûteuses, qui pourraient être mieux entreprises par d’autres ou dont les avantages restent à éclaircir. Nous pourrions faire preuve d’une plus grande sagesse en investissant de manière stratégique dans une infrastructure solide pour partager les ressources développées (au lieu de les développer nous-mêmes) et en investissant dans des stratégies qui amélioreront la valeur des membres actuels (au lieu de nous lancer à la poursuite d’idées pour de nouveaux membres).

Tout est question de valeurs, de priorités et de choix qui méritent tous notre attention afin de pouvoir occuper une meilleure position à l’avenir.


Tania Mysak, B. S. P., Pharm. D., est présidente sortante et agente de liaison pour la vision de la Société canadienne des pharmaciens d’hôpitaux

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Canadian Journal of Hospital Pharmacy , VOLUME 75 , NUMBER 2 , Spring 2022